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Hallâj, les mots de feu

Film de Véronique Aubouy, 2011.

Lecture et interprétation : Philippe Delarbre, poète, cinéaste et co-traducteur de Hallâj.

Extraits de Dîwân, Le livre des Tawassines et Le Livre de la parole de Hussein Ibn Mansour Al Hallâj (Éditions du Rocher).

 

Ô toi qui doutes, ne crois pas que maintenant je sois « moi » ni que quelque chose est ou a été. Dieu, ne crois pas que je sois « moi » ni que je serai ou que j’ai été « moi ». Je suis l’éclairé qui souffre en silence.

       Ainsi s’ouvrait aux hommes et leur parlait, à la fin du IXe siècle et au début du Xe siècle de notre ère, Hussein ibn Mansour Al Hallâj, en un temps où Bagdad l’Abbasside rayonnait de splendeur, regorgeait et se consumait de rivalités, d’influences diverses et contraires.
Missionnaire errant, extatique, inspiré, sillonnant les terres d’Orient depuis la Perse, l’Irak et la Turquie actuelles jusqu’à l’Inde et la Chine, Hallâj bouleversa les foules inquiètes et assoiffées de renouveau de l’époque autant qu’aujourd’hui encore, il frappe, émeut, par sa parole frémissante et son œuvre tout entière de passion.

Si fondent sur toi les chevaux de l’éloignement
               et que le désespoir appelle à rompre avec l’espoir
           Saisis de la main gauche le bouclier de la résignation
                                          et lie la droite à l’épée des larmes

  Passion d’un message d’amour de la Vérité, d’un message d’apprentissage de la connaissance et de l’approche du Divin, d’un message d’appel au franchissement de toutes limites intérieures, à l’élévation et au dépassement.

Il n’y a que deux pas et j’y suis parvenu. Frappe la vie au visage de ses amants et donne l’autre vie à ses dieux.

       Passion d’une vie toute tendue vers l’au-delà jusqu’à l’éblouissement, la transcendance, d’une vie brûlant d’ivresse et de ravissement, d’une vie, depuis le premier jour, ruisselant du sang des supplices qu’il avait lui-même prédits.

                                             

Tuez-moi, ô mes fidèles
                                                    en mon assassinat est ma vie

Ma mort est en ma vie
                                               ma vie est en ma mort

     Passion qui, plongeant jusqu’aux abîmes de l’histoire humaine, en remonte cette angoisse tourmentante, fardeau et misère de l’homme, cette angoisse qu’elle resserre, qu’elle sublime, dans ce cri lancé aux abords de la mosquée d’Al Mansour à Bagdad, cri qui unit l’homme à la Déité, qui le libère de ses chaînes, qui le rend à la vie.

Ana al Haq
 Je suis la Vérité

   Œuvre de passion, œuvre mystique aux sources mêmes de la pensée islamique, et que, de 1914 jusqu’à sa mort en 1962, Louis Massignon n’eut de cesse d’étudier, d’approfondir et de faire connaître, œuvre éminemment poétique, œuvre unique, universelle, replaçant en pleine lumière, le mystère de l’homme et de sa condition.

                    Philippe Delarbre

Références:

Hussein ibn Mansour Al Hallaj
Le livre des Tawassines_Le livre de la parole_Diwan
Textes traduits de l’arabe par Chawki Abdelamir et Philippe Delarbre
Éditions du Rocher.

Tombeau de Hallâj à Bagdad
Photo Philippe Delarbre 2018




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